Contestation politique sur les murs de Dakar

Article : Contestation politique sur les murs de Dakar
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10 avril 2013

Contestation politique sur les murs de Dakar

Un billet écrit par Serge Katembera sur Carioca Plus

(dakaroise près d'un tag: crédit photo Serge Katembera)
Dakaroise près d’un tag (Crédit photo: Serge Katembera)

Considéré comme un modèle de stabilité politique en Afrique, le Sénégal est également un pays où le clivage idéologique est très marqué. Les dernières élections qui ont vu Abdoulaye Wade être éjecté du pouvoir ont mobilisées les médias internationaux; quelques mois après le début de son gouvernement  Macky Sall est déjà très contesté.

Les dakarois sont très politisés et ils le font savoir sur tous les murs de la ville. Des murs qui racontent des histoires et servent directement de mirroir pour des différentes expressions idéologiques, mais ils sont aussi un espace de contestation politique. C’est sous les ponts et le long de la corniche que les inscriptions politiques sont le plus remarquables (Promenez-vous sur la côte ici).

(tag contre Macky Sall, Crédit photo: Serge Katembera)
Tag contre Macky Sall (Crédit photo: Serge Katembera)

 La ville de Dakar fait honneur à sa réputation qui en fait un centre culturel en Afrique de l’Ouest, mais également une référence régionale de tolérance religieuse et de pluralisme politique. La liberté d’expression n’est peut être pas au même niveau qu’en occident; la présence des graffitis sur les murs étant peut être le signe de l’absence d’espaces de contestation politique institutionnalisés. Néanmoins, Dakar semble être le symbole visible de l’esprit démocratique du pays.

Il faut aussi reconnaitre que le gouvernement de Sall permet à l’opposition politique de se manisfester librement même quand cette dernière utilise des langages peu recommandables dans une démocratie (Voir la photo ci-dessous)

(dans un pays où l'homosexualité est très mal vue, Macky sall fait souvent l'objet de provocation homophobe: Crédit photo: Serge Katembera)
Dans un pays où l’homosexualité est très mal vue, Macky sall fait souvent l’objet de provocation homophobe (Crédit photo: Serge Katembera)

Dans un pays où l’homoséxualité est pénalement reprimée par la loi, un fait courant dans les rues de Dakar est de taxer certains politiques d’homosexuels en s’appuyant sur un discours souvent moqueur et xénophobe. Macky Sall en est peut être la principale victime.

Les graffitis politiques de Dakar racontent des histoires, on peut donc en recenser quelques unes :

(une affiche demande la libération d'un jeune leader socialiste de Dakar: crédit photo: Serge Katembera)
Une affiche demande la libération d’un jeune leader socialiste de Dakar (Crédit photo: Serge Katembera)
  • Barthélémy Diaz ou simplement Barth est le responsable  du mouvement des jeunes du Parti Sosialiste Sénégalais (PS), parti politique fondé entre autre par Léopold S. Senghor et dont l’actuel Sécretaire Général de la Francophonie Abdou Diouf est une ancienne figure emblématique. Diaz a été incarcéré pendant au moins trois mois après avoir été accusé de meurtre à la suite d’un incident à l’arme à feu devant son domicile où une foule s’était aggloméré.
(une dakaroise est plutôt d'accord avec cette inscription, crédit photo: Serge Katembera)
Une dakaroise est plutôt d’accord avec cette inscription (Crédit photo: Serge Katembera)
  • Macky Sall veut tuer Karim est une référence au fils d’Aboulaye Wade actuellement impliqué dans une affaire de corruption. On fait état de 174 milliards de francs CFA détournés. Les partisans de Karim Wade contestent le dénouement du jugement et le font savoir en inscrivant des textes sur tous les murs de la ville. C’est intéressant de noter que certaines personnes sont plutôt d’accord avec le sors de “l’ancien prince” du Sénégal.

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  • Un leader réligieux Cheik Bethio considéré comme une divinité dans certains milieux fondamentalistes , décide de faire expulser des jeunes fanatiques de sa résidence. La situation dégénére rapidement en une bagarre qui aura un bilan de deux morts. Cheik Bethio fait entérrer les morts sans en informer la police. L’un d’entre eux serait mort asphyxié puisque l’autopsie a révélé la présence du sable dans les poumons de la victime. Celui qui est aussi appelé « le marabou » est mis sous examen judiciaire attendant son jugement en prison temporaire. Par la suite, Cheik Bethio a été diagnositiqué d’un cancer qui lui permet d’attendre son jugement en liberté provisoire en France. Ce qui pousse une partie de la population à croire que le crime restera impuni. De leur côté partisans du Cheik dénoncent une certaine arbitrarieté dans la procédure.

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Pendant ma virée sur Dakar  j’ai constaté que les graffitis politiques se concentrent sur la côte, près de la corniche et dans les quartiers riches; ce qui laissent croire que ces messages s’adressent à une catégorie sociale spécifique et peut être même aux étrangers. Le fait est que sur les murs du marché HLM de Dakar il est rare de trouver des textes  avec un contenu politique.

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Contrairement aux idées reçues en Afrique où on a tendance à croire que le pluralisme idéologique est dangereux pour la stabilité des régimes, au Sénégal et particulièrement à Dakar c’est cette diversité politique qui fait la force d’une société marquée par la tolérance.

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